Crise financière (5): la fin du dollar, grandeur et décadence d’une monnaie…
John Connally, ex-secrétaire du Trésor américain, aurait déclaré aux nations du monde au début des années 1970 : « le dollar est notre monnaie et votre problème ». Dans les articles suivants, Tebyan se penche sur la question du dollar pour voir dans quelle mesure « le dollar peut ne plus être une monnaie mais devenir leur vrai problème ».
Dans un premier temps, on vous propose de retracer l’histoire du dollar américain, l’instrument de la domination économique mondiale des Etats-Unis d’Amérique depuis les accords de Bretton Woods de 1944.
Il est clair que le dollar américain n’est plus capable, à l’heure actuelle, d’assurer l’hégémonie monétaire des Etats-Unis. Quels projets monétaires promouvoir à la place du dollar, cet instrument fétiche utilisé par le gouvernement américain depuis des décennies pour faire fonctionner son industrie de pillage systématique des richesses des autres nations ? Y voudra t-on lui substituer une monnaie mondiale ? Ou lui préférera t-on une union monétaire américaine, voire une union monétaire atlantique, ou encore une union monétaire du G8 moins la Russie et plus la Chine et l’Arabie Saoudite ? On peut aussi songer à la remplacer définitivement par une autre monnaie existante, comme le Yuan ou le rouble, ou par un panier de monnaies comme c’est actuellement le cas pour les droits de tirages spéciaux détenus par le FMI. Ce sont ces questions fondamentales que nous voulons aborder dans les quelques articles à suivre sur la crise financière. Tout d’abord, « requiem » pour le dollar américain…
Une origine modeste…
Quand, à la fin du 15ème siècle est découverte une mine d’argent village de Sankt-Joachimsthal en Bohème, qui pensait que c’était là l’origine d’une des plus grandes épopées monétaires qu’ait connue l’humanité. Du minerai produit de cette mine est frappé le joachimsthaler, vite abrégé en thaler.
Cette monnaie se répandit dans l’empire des Habsbourg. Les thalers furent utilisés dans de nombreux Etats allemands (Brême, Brunswick, Hanovre, Mecklembourg-Schwerin, Mecklembourg-Strelitz, Oldenbourg, Prusse, Saxe). Ce nom est également à l’origine du nom du tolar slovène.
A la mort de l’impératrice Marie-Thérèse en 1780, un très important stock de thalers autrichiens, qui venaient d’être frappés, a été vendu à des petites monarchies de la région du Yémen, ils furent utilisées comme monnaie d’échange jusqu’à une période récente.
Cette monnaie se répandit aussi en Amérique latine, où elle devint le d?lar. Le fameux « s » barré ($) provient probablement de l’appelation “Spanish pillar dollar” quand les espagnols importèrent le Thaler centre-européen aux Amériques. Les armoiries espagnoles, qui figuraient sur les dollars d’argent, font apparaître deux colonnes, représentation héraldique des Colonnes d’Hercule.
Le premier dollar américain, a été imprimé en 1690 par la colonie du Massachusetts, mais son design était très différent car il ressemblait aux assignats révolutionnaires. Quand les Etats-Unis acquirent leur indépendance, ils prirent pour monnaie le dollar. Le dollar a été adopté par le Congrès de la Confédération le 6 juillet 17853. La célèbre maxime « In God We Trust » (En Dieu nous croyons) apparut en 1864 sur la pièce de 2 cents. Approuvée en 1955 par un acte du Congrès, elle est depuis systématiquement imprimée sur tous les billets américains.
1944-1971 : le Gold Exchange Standard
Le système monétaire mondial dit du Gold Exchange Standard (étalon de change or) a été mis en place par les accords de Bretton Woods en 1944 et donne une place prépondérante au dollar.
Il repose sur deux piliers principaux :
•un système de changes fixes entre monnaies (avec de très faibles marges de fluctuations)
•la reconnaissance du dollar comme monnaie de réserve internationale (as good as gold), qui reste convertible en or, mais seulement dans le cadre des échanges entre banques centrales.
Si le système fonctionne correctement dans les années 1950, l’accumulation dans les années 1960 des déficits américains encore accrus par les dépenses afférentes à la guerre du Viêt Nam entraînait au tout début de la décennie 1970 de très fortes pressions sur la monnaie américaine. Or sa fonction de monnaie de réserve mondiale gênait fort peu les Etats-Unis et ne les incitait pas à mieux contrôler leurs déficits.
1971-1973 : période de transition
C’est le 15 août 1971 que le président Richard Nixon décide l’inconvertibilité du dollar par rapport à l’or, suite aux tensions permanentes sur cette monnaie.
Cette décision est prise sans consulter les partenaires (autres pays occidentaux et Japon). Elle s"explique par le danger sérieux et croissant que les autres pays exigent la conversion en or de leurs excédents de dollars, puisque le dollar était convertible en or, tout au moins dans les échanges entre banques centrales.
Avec ce diktat américain le système de Bretton Woods entrait en agonie, puisque la valeur de chacune des monnaies y était déterminée par référence à un poids d"or. Les pressions sur le dollar ne pouvaient qu’empirer, ce qui se produisit.
Plusieurs réunions eurent lieu pour s’accorder sur une dévaluation de la devise américaine et tenter un replâtrage du système. Elles débouchèrent sur les « accords de Washington », dits aussi « accords du Smithsonian Institute », conclus le 18 décembre 1971 par les ministres des finances et banquiers centraux du « Groupe des Dix » (la CEE, la Suède, les Etats-Unis, le Canada et le Japon) qui établirent des parités centrales et des marges de fluctuation de 2.25% (texte du communiqué final).
Le 13 février 1973, la faiblesse de la monnaie américaine conduisait à un réajustement des parités, le dollar étant dévalué de 10%, mais cela se révéla immédiatement insuffisant.
Depuis 1973 : le régime des changes flottants
Le 19 mars 1973, le « Groupe des Dix » décidait l’abandon de la fixité des taux de change des diverses monnaies par rapport à l’étalon dollar, ce qui permettait aux banques centrales des autres pays de cesser d’acheter du dollar pour maintenir sa parité, selon les règles du jeu du système en vigueur.
Un nouveau système monétaire international dit de « changes flottants » voyait donc le jour. Il est toujours en vigueur.Les accords de la Jamaïque entérineront formellement cette situation le 8 janvier 1976.
De 1973 à 1979, le dollar continue sur sa lancée et se déprécie régulièrement et considérablement par rapport au Deutsche Mark, perdant près de 50% de sa valeur (cf graphique supra.)
La violente remontée des taux d’intérêt décidée à la fin de 1979 par le nouveau gouverneur de la banque centrale américaine, Paul Volcker, pour combattre - avec succès - l’inflation, inverse la tendance.
Le remède est sévère : pour une inflation de l’ordre de 9% en taux annuel en 1980, les taux d’intérêt à court terme montent jusqu’à 19%.
Les taux d’intérêt réels atteignent des sommets sans précédent et, au prix d’une sévère récession,l’inflation disparaît : en 1983, elle n’est plus qu’à 3.2%. Ces taux d’intérêt réels provoquent un afflux de capitaux aux Etats-Unis, et le dollar s’apprécie pendant cinq ans, jusqu’à revenir, en mars 1985, à son niveau d’avant 1973, ce qui est manifestement exagéré.
Septembre 1985 : les accords du Plaza
A l’hôtel Plaza de New York, le 22 septembre 1985, les pays dits du G5 (c’est-à-dire ceux du G7 moins le Canada et l’Italie) s’entendent publiquement pour intervenir sur le marché des changes et organiser un repli du dollar.
10 milliards de dollars sont ainsi dépensés, avec un effet immédiat et spectaculaire. En à peine quinze mois, le dollar efface tous ses gains par rapport au Deutsche Mark et, fin 1986, il se retrouve à son plus bas niveau historique, celui de 1979.
Février 1987 : les accords du Louvre
Désireux de stopper la machine infernale qu’ils ont mise en route, les pays du G5, rejoints par le Canada, signent à Paris le 22 février 1987 les accords du Louvre, destinés à enrayer la baisse du dollar. Seulement, cette fois-ci, cela ne marche pas et, après une pause dans le courant de l’année 1987, le dollar va continuer pendant dix ans, tendanciellement, à se déprécier.
2007 : baisse du dollar
En raison de la crise des « subprimes », du double déficit des Etats-Unis, et de la nécessité d’acheter du pétrole bon marché pour faire la guerre en Iraq, ainsi que de la baisse des taux de la FED, le dollar a baissé au point où 1 euro coûte 1,45 dollar étasuniens, le 1er novembre 2007.
Dans l’article suivant, nous verrons pourquoi le dollar américain ne peut plus rester la clé de voûte du système monétaire international.
Source: www.wikipedia.org
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