Le télescope Hubble rempile pour cinq ans
Vingt-six ans, pour un humain, c’est le bel âge. Pour un satellite scientifique, en revanche, c’est l’entrée dans la très grande vieillesse, surtout quand l’engin – en l’occurrence le télescope américano-européen Hubble – était programmé pour une durée de vie de quinze ans. Plus d’un quart de siècle après son lancement, le 24 avril 1990, à bord de la navette Discovery, le plus puissant observatoire spatial jamais mis en orbite, est toujours en pleine forme. Et comme son successeur, le télescope James Webb (JWST selon l’acronyme anglais) a accumulé un retard aussi énorme que son dépassement de budget et ne partira dans l’espace qu’en octobre 2018, la NASA vient d’annoncer que la mission de Hubble était prolongée cinq nouvelles années.
Pour environ 40 millions de dollars par an, Hubble va continuer d’explorer les cieux jusqu’au 30 juin 2021. Si tout se passe bien, l’observatoire spatial aura donc passé plus de trois décennies au-dessus de nos têtes pour le plus grand bonheur des astronomes qui auront eu la chance de décrocher ce qu’en jargon on appelle du « temps d’observation ». Cette prolongation de mission n’est pas sans intérêt pour les chercheurs car cela signifie que, pendant deux ans et demi, de fin 2018 à mi-2021, Hubble et son successeur fonctionneront ensemble. Comme les instruments des deux engins n’opèrent pas exactement dans les mêmes longueurs d’ondes (Hubble travaille dans l’ultra-violet, le visible et le proche infra-rouge tandis que le JWST se consacrera à l’étude des objets dans l’infra-rouge), cela permettra aux astronomes d’avoir des observations complémentaires.
Une chute inéluctable
Interrogé par le New Scientist, Boris Gänsicke, enseignant-chercheur à l’université de Warwick (Royaume-Uni) et utilisateur régulier de Hubble, souligne ainsi que cette complémentarité sera intéressante pour étudier les restes des systèmes planétaires autour des naines blanches (qui sont des cadavres d’étoiles) : Hubble peut déjà donner des informations sur les astéroïdes qui se précipitent sur les naines blanches, dit le New Scientist, et son successeur pourra quant à lui étudier ce qui subsiste du disque de poussières autour de ces étoiles mortes. « Cela nous donnera deux manières complètement indépendantes d’analyser les mêmes choses, explique Boris Gänsicke, ce qui renforcera grandement les résultats et nous permettra de déterminer de quel type de minéraux ces astéroïdes sont faits. »
Tout comme les étoiles meurent, Hubble finira par trépasser. Pendant les années 1990 et 2000, des missions d’entretien se sont succédé à son chevet pour le requinquer, par l’entremise des navettes spatiales américaines. La NASA profitait de ces missions pour remonter l’orbite du télescope spatial. En effet, même si, à plus de 500 kilomètres d’altitude, l’atmosphère terrestre est extrêmement ténue, le frottement avec ses atomes ralentit l’engin et le fait progressivement descendre. Et aujourd’hui il n’y a plus de navettes spatiales pour jouer les ascenseurs. A un moment qui se situera entre la fin des années 2020 et celle des années 2030, Hubble retombera sur Terre. Comme l’observatoire est tout de même un beau gaillard de 11 tonnes, il est déjà envisagé de provoquer sa rentrée dans l’atmosphère afin que les débris de l’observatoire, dont certains ne se consumeront pas entièrement, ne tombent pas sur une zone habitée. Ils finiront probablement dans l’océan Pacifique, le cimetière des éléphants de l’espace.
source: http://passeurdesciences.blog.lemonde.fr