Hussayn Mãher (2)
M. Mãher a peint pendant une dizaine d’années des tableaux en rapport avec les paysages et les habitants du sud de l’Iran. Ensuite il a commencé une série de tableaux sur l’amour et la beauté. Certaines personnes ont même trouvé que ses tableaux étaient devenus décoratifs, alors qu’à son avis ce n’était pas le cas. A l’époque, son intention était juste d’exprimer ses sentiments. Il dit cela alors qu’il ne renie pas la valeur décorative de l’art; l’une des caractéristiques positives de l’art est justement son côté décoratif.
Il n’a pas organisé d’exposition pendant trois ou quatre ans, mais il travaillait et lisait en permanence. Il a commencé à étudier très sérieusement le dessin iranien, depuis l’Ecole de Shirãz et de Bagdad et l’époque Seljoukide, jusqu’à l’Ecole de Tabriz.
Il conseille d’ailleurs toujours à ses élèves d’apprendre l’histoire de l’art de notre propre culture avant l’histoire de l’art occidental, parce que ce fond culturel est présent dans l’esprit de tous les Iraniens même quand ils n’en sont pas conscients, et parce que la culture orientale est très riche; elle a beaucoup enrichi l’œuvre des artistes occidentaux. Lire le Shãhnãmeh (Livre des Rois) de Ferdowsi a également beaucoup aidé à M. Mãher. Il lit le Shãhnãmeh encore maintenant, parce qu’il y trouve des aspects de la culture iranienne qui sont à son avis en train d’être oubliés.
En 2006, Il a organisé une exposition intitulée «J’invite les anges à venir sur la Terre» à la Maison des Artistes de Téhéran. Là encore, il y avait des poissons dans ses tableaux; ils représentaient des anges. Ces tableaux étaient une autre tentative d’exprimer les mythes présents dans la vie quotidienne. Son exposition suivante fut intitulée «Les visages». Elle correspondait à une série de portraits différents de ce que l’on dessine habituellement, car il voulait figurer le temps qui passe. Pour cela, il s’est concentré sur les blessures, les rides, et toutes les traces qui marquent les visages au fil des années. Quand on se regarde dans le miroir, on voit un visage que l’on ne reconnait pas, comme s’il s’agissait du visage d’un inconnu. Ce sont alors uniquement ces blessures et ces rides qui vous permettent de vous reconnaitre. Cette exposition a été une réussite; Il veut dire que les gens ont réagi favorablement.
Ensuite, il a continué à réfléchir sur représenter le temps. Ses études sur le dessin iranien ancien ont également inspiré M. Mãher et le résultat de tout cela a été une série de tableaux, qu’il a exposés l’année dernière, où il a tenté de représenter le temps avec des thèmes tels que la fuite devant une menace, dans des scènes où figurent des animaux. Il a utilisé dans ces tableaux des éléments picturaux de la culture iranienne. Par exemple, Il a peint un triangle très pointu au-dessus d’un cheval; le triangle risque de tomber sur lui avant qu’il n’ait le temps de fuir.
Son style a changé au cours de ces dernières années. Car il a pu améliorer ses capacités de peindre ce qu’il a dans l’esprit. Sa façon de dessiner a changé, mais ces changements ont été très progressifs. On peut déceler une continuité dans ce qu’il a peint et dans sa technique, depuis le début jusqu’à maintenant. Mais ceux qui n’ont pas vu deux ou trois de ses expositions ont le sentiment d’assister à des changements brusques.
Ses expositions présentaient une série de tableaux de poissons. La chèvre et le poisson sont les deux animaux dont l’image est présente dans son esprit depuis son enfance. Ils évoquent pour lui le Khouzestãn et le Golfe persique.
Il a dû les voir souvent dans les palmeraies ou dans les marchés quand il était enfant. Ses premiers tableaux étaient justement à propos du sud de l’Iran, et les poissons ont été présents dans ses peintures depuis le début. Mais à sa dernière exposition, il a choisi de peindre uniquement des poissons morts et dépecés; car il aime la forme du poisson, parce qu’il ressemble beaucoup au corps humain, surtout le poisson que l’on a préparé pour la cuisson, dont le ventre est ouvert; le haut du poisson ouvert évoque pour lui deux épaules; on voit la colonne vertébrale; la queue du poisson et les pieds; et les nageoires ressemblent à des bras un peu courts. Il précise que ces tableaux sont très grands (leurs dimensions est de 1,5 sur 2 mètres environ), ce qui augmente leur ressemblance avec le corps humain. On reçoit un choc en les voyants. Cette exposition était d’ailleurs intitulée «Choc».
Source: Teheran.ir